Louis Segond 1910
Versliste
Pourquoi ne suis-je pas mort dans le ventre de ma mère? Pourquoi n'ai-je pas expiré au sortir de ses entrailles?
Pourquoi ai-je trouvé des genoux pour me recevoir, Et des mamelles pour m'allaiter?
Je serais couché maintenant, je serais tranquille, Je dormirais, je reposerais,
Avec les rois et les grands de la terre, Qui se bâtirent des mausolées,
Avec les princes qui avaient de l'or, Et qui remplirent d'argent leurs demeures.
Ou je n'existerais pas, je serais comme un avorton caché, Comme des enfants qui n'ont pas vu la lumière.
Là ne s'agitent plus les méchants, Et là se reposent ceux qui sont fatigués et sans force;
Les captifs sont tous en paix, Ils n'entendent pas la voix de l'oppresseur;
Le petit et le grand sont là, Et l'esclave n'est plus soumis à son maître.
Pourquoi ai-je trouvé des genoux pour me recevoir, Et des mamelles pour m'allaiter?
Pourquoi donne-t-il la lumière à celui qui souffre, Et la vie à ceux qui ont l'amertume dans l'âme,
Si j'ai péché, qu'ai-je pu te faire, gardien des hommes? Pourquoi me mettre en butte à tes traits? Pourquoi me rendre à charge à moi-même?
Que ne pardonnes-tu mon péché, Et que n'oublies-tu mon iniquité? Car je vais me coucher dans la poussière; Tu me chercheras, et je ne serai plus.
Pourquoi m'as-tu fait sortir du sein de ma mère? Je serais mort, et aucun oeil ne m'aurait vu;
Pourquoi saisirais-je ma chair entre les dents? J'exposerai plutôt ma vie.
Pourquoi caches-tu ton visage, Et me prends-tu pour ton ennemi?
Pourquoi les méchants vivent-ils? Pourquoi les voit-on vieillir et accroître leur force?
Pourquoi le Tout-Puissant ne met-il pas des temps en réserve, Et pourquoi ceux qui le connaissent ne voient-ils pas ses jours?
Lorsque Jacob eut achevé de donner ses ordres à ses fils, il retira ses pieds dans le lit, il expira, et fut recueilli auprès de son peuple.
Joseph vit les fils d'Ephraïm jusqu'à la troisième génération; et les fils de Makir, fils de Manassé, naquirent sur ses genoux.
Car ainsi parle l'Eternel: Voici, je dirigerai vers elle la paix comme un fleuve, Et la gloire des nations comme un torrent débordé, Et vous serez allaités; Vous serez portés sur les bras, Et caressés sur les genoux.
Quand un homme aurait cent fils, vivrait un grand nombre d'années, et que les jours de ses années se multiplieraient, si son âme ne s'est point rassasiée de bonheur, et si de plus il n'a point de sépulture, je dis qu'un avorton est plus heureux que lui.
Car il est venu en vain, il s'en va dans les ténèbres, et son nom reste couvert de ténèbres;
il n'a point vu, il n'a point connu le soleil; il a plus de repos que cet homme.
Qu'ils périssent en se fondant, comme un limaçon; Sans voir le soleil, comme l'avorton d'une femme!
Le pauvre mourut, et il fut porté par les anges dans le sein d'Abraham. Le riche mourut aussi, et il fut enseveli.
Dans le séjour des morts, il leva les yeux; et, tandis qu'il était en proie aux tourments, il vit de loin Abraham, et Lazare dans son sein.